Saintélyon 2012 – La der de l’année…

La Saintélyon - 1er / 2 décembre 2012

Il est pile 7h en ce dimanche matin, sous les flocons de neige lorsque j'entrevois l'entrée du palais des sports de Gerland, encore quelques secondes, un petit sprint, pour la forme, et me voila sous l'arche d'arrivée. Immédiatement je me trouve envahi par une sensation étrange, savant mélange de joie, de soulagement, de fierté, hésitant entre rire et larmes pendant de longues minutes.

Cette sensation si spéciale je ne l'ai ressenti qu'à quelques reprises lors de ma petite carrière de runner, la première fût à l'arrivée de mon premier marathon, et la dernière en date lorsque j'ai franchi la ligne d'arrivée du raid du Morbihan cette année en compagnie de mes enfants.

Mais pourquoi un tel débordement d'émotions ? Seul mon excellent résultat (77ème sur plus de 6000 partants) ne peut expliquer ce phénomène, les conditions météo y sont peut-être aussi pour quelque chose....

Petit retour en arrière :

Mardi 27 novembre 18h30 dernière petite séance d'entrainement, quelques gammes sur 200m quand soudain une forte douleur à la cuisse me contraint à stopper net ma séance, je parviens tout juste à trottiner en boitant pour rentrer chez moi.

Mercredi 28, force est de constater que c'est pas le top, j'arrive à peine à marcher, ça tire de partout. Je commence sérieusement à envisager de jeter l'éponge ! Fatigué par une longue saison et handicapé par cette soudaine contracture, les perspectives sont pessimistes...

Jeudi, petit footing léger pour prendre une décision définitive : c'est douloureux, j'ai l'impression de me traîner, mais allez savoir pourquoi, je me refuse à l'idée de renoncer, quitte à prendre le risque de me blesser pour de bon. Je me dis qu'au pire, cela me fera quelques semaines de repos !

C'est donc dans l'inconnue, sans objectif autre que celui de ramener la bête à l'arrivée que je me dirige samedi soir peut avant minuit vers la ligne de départ. Ma cuisse va mieux, je marche presque normalement, mais qu'est ce que cela va donner en courant ?

Samedi, minuit, le moment tant attendu est arrivé, ça y est la meute est lâchée !! Le départ est donné sur un rythme très élevé, de mon côté,  après un premier kilomètre plutôt rapide, je prends rapidement un rythme plus raisonnable, et très vite je me rend compte que la nuit va être longue. Dès les premiers kilomètres, je ne suis pas dans le coup, je suis même obligé de m'arrêter pour desserrer mes chaussures qui me coupent la circulation.

La première côte est longue mais pas trop ardue, je prends le parti de continuer sur un rythme lent, je ne voudrais pas réveiller ma cuisse, toujours en délicatesse. Puis nous arrivons sur les premiers sentiers, où le décors est rapidement planté : la neige est belle et bien présente en quantité abondante et rapidement on se retrouve sur une sorte de single track improvisée, avec 30 à 50 cm de neige sur les bas côtés.

Alors que les concurrents devant moi commencent à marquer le pas et avancent avec une certaine appréhension, je trouve soudain un second souffle, comme transcendé par ces conditions qui me conviennent parfaitement. Je me sens comme un poisson dans l'eau, oubliées les douleurs, oubliée la fatigue, je me lance dans une folle et éperdue remontée.

Sur ces chemins rendus étroits par les conditions, il est difficile de rattraper le temps perdu, toutes les occasions sont bonnes, quitte à m'enfoncer dans la neige jusqu'en haut des mollets pour créer une trace parallèle à la trace principale et remonter quelques places.

Sur les portions de bitume, la neige laisse le plus souvent la place à de gigantesques plaques de verglas, qu'il est parfois impossible d'éviter. Les concurrents tombent comme des mouches, il y en a même un qui me met une claque en essayant de se rattraper !

Comme tous les autres, je n'échapperai pas aux chutes. La première m'offrira un joli bleu sur le côté gauche ainsi que sur le coude, la seconde m'entraînera dans une jolie glissade sur le dos d'une vingtaine de mètres, je réussirai à m'arrêter en m'agrippant à une spectatrice. Bilan un gros hématome dans le bas du dos. Une belle frayeur pour la troisième où je me suis rattrapé sur les coudes en évitant d'extrême justesse de me tordre le genou droit. La dernière interviendra aux environs de la mi-course, quasiment à l'arrêt mais n'occasionnera pas de dégâts notables.

Jusqu'à la mi-course, les conditions restent très similaires et l'alternance entre neige et verglas continue, alors que je poursuis ma remontée. Je passe à Sainte Catherine sans même jeter un oeil sur le ravitaillement, comme je l'avais déjà fait au premier poste de Saint Christo.

Alors que la neige laisse progressivement place à la boue, la course devient plus fluide et je peux enfin courir à mon rythme, sans me soucier des autres concurrents. Il faut néanmoins rester vigilant, car si la neige a quasiment disparue, il reste nombre de plaques de verglas qui sont autant de pièges possibles.

Passage au ravitaillement de Saint Genoux. Je prends le temps de remplir le Camel, de basculer la frontale sur la seconde batterie, de grignoter quelques biscuits sur les tables de ravitaillement, puis de repartir en marchant sur quelques centaines de mètres pour récupérer un peu. Si mon plan de course est  respecté, ce ravitaillement sera le seul et l'unique que je visiterai.

La seconde partie du parcours commence sur une côte assez importante que je négocie tranquillement avant d'aborder une partie plus descendante qui comporte néanmoins deux petites bosses difficiles à négocier, mon rythme s'en ressens et je suis un peu au creux de la vague avant d'aborder la première des 3 grosses difficultés restantes.

Je monte tranquillement, en marchant dans les portions les plus difficiles, pas question de se mettre dans  le rouge alors que nous sommes encore à près de 30 kilomètres de l'arrivée. Je sais par ailleurs qu'une fois en haut, la suite sera une descente plus ou moins tranquille sur une petite dizaine de kilomètres.

La descente me permet de reprendre des forces et de relancer progressivement la machine, d'autant plus motivé qu'un à un je reviens sur des "petits" dossards, là je commence à me dire que malgré un début de course difficile, me voila revenu en bonne place dans le classement.

Gonflé à bloc, je poursuis mon effort, comme prévu, je passe le ravitaillement de Soucieu sans m'arrêter et continue ma remontée. J'arrive au pied de l'avant dernière grosse côte, que je négocie très tranquillement afin de garder des forces pour la fin.

Il ne reste plus qu'une quinzaine de kilomètres et je me sens de mieux en mieux, il ne nous reste plus qu'une partie sur un chemin très boueux avant d'attaquer la côte finale, celle de Sainte Foy, redoutable et interminable montée que je passerai en marchant sur sa plus grande longueur.

Je sais qu'une fois arrivé en haut de cette côte, la suite ne sera plus que descente avant le passage sur les quais, que je redoute plus que tout !

Je remonte encore quelques places et galvanisé par la proximité de l'arrivée, je relance encore l'allure dans la descente. Nous voila sur les quais, il ne reste plus que 5 kilomètres environ, même si les panneaux en indiquent 4 !! sur ce terrain plat le long des quais, il est très difficile de maintenir le rythme, je tiens bien et même si je faiblis un peu dans les deux derniers kilomètres je ne lâche rien, 3 concurrents revenus de l'arrière parviennent cependant à me dépasser, mais je n'ai plus suffisamment de jus pour les suivre. Mais qu'importe, j'ai déjà le sentiment d'avoir réalisé une grande course, oubliées les chutes, oubliées les douleurs à la cuisse, l'arrivée est proche, plus qu'un kilomètre, plus que quelques centaines de mètres, sous la neige qui tombe de plus en plus fort. Puis au loin le panneau 100 m, j'entends un coureur revenir derrière moi, mais pas le temps de regarder s'il s'agit d'un relais ou d'un solo et pas question de perdre une place dans ce final, alors j'allonge la foulée et accélère le rythme, puis je passe au 50m puis au 25m avant de tourner à droite pour pénétrer dans le palais des sports....

Ca y est, j'y suis ! C'est la fin, en 7h00'28" et largement dans les 100 premiers, ce que je n'osais espérer au départ de Saint Etienne. L'émotion est forte, intense et j'ai le sentiment d'avoir réalisé une belle course, peut-être la plus belle de l'année...

Je passerai peut-être pour un original, mais je suis content d'avoir couru dans de telles conditions, ce n'est pas tous les jours qu'on a la chance de courir dans 30 à 40 cm de neige, j'adore ce type de terrain rendu très sélectif et d'ailleurs je suis persuadé que sans cette neige, je n'aurai pas aussi bien terminé.

En ce qui me concerne, cette arrivée met un terme à ma saison 2012, sur une course qui ne manquera pas de rester gravée dans ma mémoire.


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