Trail des Poilus 2018 : Retour en enfer…

Château d'Olhain - samedi 10 mars 2018 - 09h00

Préambule :

De ma première participation au trail des Poilus en 2016, j'avais gardé un goût amer. Celui d'une course que j'avais subie jusqu'à l'humiliation de me faire déposer sur la ligne d'arrivée... pour la 19ème place !

J'ai longuement hésité avant de revenir me frotter à cette épreuve, mais, calendrier faisant, et désir de vengeance ont eu raison de mes appréhensions.

Partant de là, j'ai axé une bonne partie de ma préparation hivernale sur ce trail des poilus qui, de fait est devenu mon premier objectif principal de la saison 2018 !

Un petit grain de sable...

Et pour une fois, la préparation était bonne, le travail accompli durant l'hiver allait porter ses fruits, j'en étais certain. Et c'est en toute confiance que j'allais aborder la grande bataille des tranchées !

Mais c'était sans compter sur un petit grain de sable... dimanche 04 mars, semi de Paris... après une grosse semaine d'entrainement, je l'aborde comme une dernière sortie longue, en rythme. Le chrono n'est pas formidable, loin de là, mais ce n'était pas l'objectif. En rentrant je commence à tousser, j'ai dû prendre froid, avec le redoux et l'humidité me voilà infecté !

Lundi, tout empire, je tousse de plus en plus, mal au crâne, je fini même par aller chez le Doc (ceux qui me connaissent savent que j'y vais jamais pour rien). Verdict : grosse bronchite, traitement de cheval au programme !

Les jours passent... et aucune amélioration de mon état en vue : toux, fièvre, maux de crâne.... bref, j'en viens à me demander ce que je vais faire le week-end... y aller.. ou pas ?

Légers signes d'amélioration à partir de jeudi, mais ça reste compliqué... je passe mes nuits à tousser, et je ressens une grosse fatigue, néanmoins, comme je ne suis pas du genre à renoncer, je prépare mon package et prend la route pour le Ch'nord !

La nuit de vendredi à samedi est très difficile : beaucoup de toux, très peu de sommeil... bref ça va être pour le moins compliqué !

Dans le flou total

Malgré tout cela, me voilà aux portes du château d'Olhain en ce samedi matin pour partir au combat. Mais quel combat ? je n'ai pas fais la moindre minute de sport de la semaine, je continue à cracher mes poumons... Je n'ai aucune idée de ce qui m'attend. Vais-je simplement pouvoir courir ?

J'envisage alors tous les scénarios, surtout les pires.... et me dit que je m'arrêterais au 1er ravito si ça va mal... ou au suivant ?

Top départ

Plus le choix, maintenant faut y aller, dans ces conditions c'est un grand saut dans le vide, un pas vers l'inconnu !

Je prends un départ prudent, mais remonte vite dans le classement. Au bout d'un km me voilà à la 6ème place. Vu mon état, j'estime que c'est un peu trop rapide, les jambes vont bien, mais le souffle est court.... ça tiendra pas longtemps comme ça !

Je passe bien la première petite butte, signe que les jambes sont ok. Ensuite quelques petites erreurs d'inattention m'écartent légèrement de la bonne trace. L'occasion de temporiser et de rentrer dans le rang.

Au bout de quelques kilomètres, ma position se stabilise, aux alentours de la 23ème place. Plus personne devant, et plus personne derrière.

A mon rythme

Me voilà donc seul avec moi-même. Ayant mis de côté mes ambitions au classement général, je suis à l'écoute de mon corps... Je prends un rythme de sénateur : tout en gestion, sans pression et sans me mettre dans le dur.

Cette première partie du parcours est très roulante, et présente peu de difficultés, même si les organisateurs font leur possible pour nous faire passer dans des endroits inconfortables, tels le lit d'une rivière asséchée....

Tout en gestion

Je poursuis ainsi sans encombre jusqu'au premier point de ravitaillement dans le parc d'Olhain. Je me sens plutôt bien, pas de fatigue, pas de douleurs.... enfin tout est relatif bien sûr !

Le parcours est toujours roulant, presque agréable, j'en viens à oublier les raisons qui m'avaient fait maudire cette course 2 ans auparavant. Détaché de la pression du résultat, je me surprends même à y prendre un peu de plaisir !

Le passage au 2ème ravito au 31ème km se fait sans encombre, tout va toujours aussi bien. Je sens que je pourrais continuer comme ça encore pendant longtemps ! Ma remontée a commencé, tout en douceur, et je pointe désormais à la 20ème place.

Le début de l'enfer...

Aux environs du 37ème km, les choses sérieuses commencent. Là où j'avais été pris 2 ans auparavant d'une furieuse envie d'abandonner. A partir de là, le trail des Poilus nous montre son vrai visage. Avec une première montée hors piste sur un terrain encore plus gras que lors de l'édition précédente.

Ca y est, on commence à s'accrocher aux branches, aux racines, à tout ce que l'on trouve, pour se hisser en haut de la butte. On oublie le temps, le chrono, les allures.... imaginez 19 minutes pour effectuer... 2 petits kilomètres !

Une fois en haut c'est pas fini, il faut continuer ce hors piste dans les ronces et racines... jusqu'à la descente suivante, dré dans le pentu et la boue. On s'accroche à la clôture pour ne pas tomber. Mon seul objectif à ce moment : éviter la blessure ! Je pense à tous ceux qui vont passer après moi, sur un terrain de plus en plus dégradé....

Les raisons qui m'avaient fait détester cette course remontent rapidement à la surface, mais je ne me démoralise pas pour autant. Aujourd'hui mon seul but est de terminer, ma seule victoire sera de voir la ligne d'arrivée... alors peut m'importe le temps que j'y perd... du moment que je ramène la bête en un seul morceau !

Sur la trace des Poilus

Même si je ne suis absolument pas fan de ce type de parcours qui ressemble plus à un truc du type Mudday qu'à du trail, je ne peux m'empêcher d'avoir quelques pensées pour ces fameux Poilus qui vécurent en ces lieux des heures effroyables, bien pire que ce que je suis en train de vivre moi.

Le passage dans la grande tranchée est très émouvant et chargé de symboles. Par rapport aux concurrents du dimanche, nous n'aurons que peut d'eau, à l'exception d'un petit passage d'une dizaine de mètres où je me retrouve dans l'eau glacée jusqu'à la taille. Au passage je présente mes excuses à Harold que j'ai un peu éclaboussé en passant alors que lui tentait d'éviter la marre !

Un petit crochet en forêt et nous voilà au 3ème ravitaillement à Ablain-Saint-Nazaire. L'ambiance y est très sympathique et Péline y a mis de l'animation ! De quoi me redonner des forces pour repartir à l'assaut de ce grand chantier.

Des petits airs de Barkley

Il reste moins de 18 km  à parcourir, mais je le sais, le parcours est loin d'être une balade de santé. Certains passages à venir seraient digne de la Barkley : montées et descentes droit dans la pente, sans chemin ou presque. Sur ce terrain extrêmement glissant, obligation de s'accrocher à tout ce qui dépasse : branches, racines, ronces...

Cela commence à devenir véritablement éprouvant. Le chrono ne veut vraiment plus rien dire tellement il est difficile de passer, même en marchant. Arrive une grosse butte, très raide, glissante qui heureusement est (c'est la seule) équipée d'une corde... et d'un bénévole fort sympathique qui nous tend une main salvatrice pour nous permettre d'arriver en haut !

La suite est du même genre : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ! Les organisateurs jouent avec nos nerfs, nous faisant faire mille et un détour pour ne pas rater une miette de D+ !

Chaque occasion est bonne pour nous emmener hors piste, pour nous mettre en situation périlleuse. Décidément, j'en suis convaincu maintenant, cette course est vraiment hors nomes ! Après chacun est libre d'apprécier... ou pas !

Jusqu'au bout....

Au gré de mes aventures, me voilà passé au dernier point de ravitaillement, il reste moins de 8 km à parcourir... mais encore quelques passages épiques à venir !

Mais qu'importe, le paris est gagné, je sais maintenant que ça ira au bout... et pas si mal que ça finalement ! Car me voilà maintenant 15ème ! et dès la montée suivante je trouve en point de mire le 14ème !

De quoi me redonner un peu de tonus ! Je donne alors tout ce qui me reste pour rattraper ce concurrent. Je le rejoins et le dépasse au sommet de la butte et poursuis mon aventure.

Les jambes commencent malgré tout à piquer, je suis presque à la limite des crampes. Mais il ne faut rien lâcher, continuer coûte que coûte pour rejoindre au plus vite l'arrivée.

La montée des marches

Arrive alors la fameuse montée des marches, qui nous emmène juste derrière l'arrivée, en haut de la colline de Notre-Dame de Lorette.... qu'il faudra bien entendu redescendre... et remonter de l'autre côté !

Même s'il reste pratiquement 4 km  à parcourir, cette montée de marches signifie que la fin est proche. Une ultime descente, avec encore des passages hors piste dans la boue et les ronces... qui me vaudra une petite chute sur les fesses (histoire d'avoir vraiment le look d'un poilu boueux !), puis une portion plus roulante avant l'ultime montée.

Si je suis pris par l'angoisse de voir un concurrent revenir de l'arrière, comme ce fût le cas lors de ma première participation, mon attention se porte très vite vers l'avant. En effet, alors que j'ai pourtant l'impression de ne pas aller bien vite, j'aperçois, à un peu plus d'une minute devant moi le 13ème !

Je me dis alors que j'ai encore une petite chance de revenir, et que même si ce n'est pas vraiment le cas, au moins je ne me focaliserai pas sur ce qui pourrait se passer derrière moi !

l'ultime assaut

Je me lance alors dans la bataille, reprend un rythme plus soutenu et me rapproche tout doucement de ma proie. A l'orée de la dernière ascension, je pointe à moins d'une minute. Je me dis alors que tout est encore possible, mais ayant probablement senti le danger mon adversaire relance lui aussi.

Très vite je comprend que je ne pourrai faire la jonction, je me contente alors de maintenir une cadence correcte, rien de sert d'achever la bête !

Je profite des derniers instants de cette course, savoure le dernier raidillon, aussi pentu que glissant et arrive enfin sur le plateau de Notre-Dame de Lorette !

Je prends alors tout mon temps pour effectuer les derniers mètres, encouragé par la foule et Péline qui a piqué le micro du speaker !

Le soulagement

Je vis cette arrivée comme un soulagement ! D'abord celui d'en avoir terminé, alors même que je n'étais pas certain de pouvoir courir ce matin. Puis celui d'avoir, au moins partiellement, lavé l'affront subi lors de la précédente édition.

Alors oui, 14ème pourrais me sembler n'être qu'un résultat très moyen au vu de la forme que j'avais une semaine auparavant et de la préparation réalisée. Mais dans mon état, je ne suis toujours pas guéri au jour où j'écris ces lignes, cette 14ème place est presque inespérée. Mieux que ma 19ème d'il y a deux ans, avec en plus une fort belle manière !

C'est aussi cela le sport, savoir faire du mieux possible avec les moyens dont on dispose le jour J, et de ce côté là, je peux être fier de moi, fier d'avoir vaincu le parcours, fier d'avoir surmonté la maladie !

Une belle aventure

Pour conclure, alors oui, je ne suis pas franchement adepte de ce type de parcours, trop "sauvage" à mon goût, mais je dois reconnaître que l'organisation était au top, les bénévoles super sympa, l'ambiance chaleureuse...

Je voudrais donc saluer l'organisation et lui dire un grand bravo. Sans oublier une pensée particulière pour nos ancêtres qui en ont bavé et pour beaucoup ont laissé leur vie sur ces champs de bataille que nous avons eu l'immense privilège de traverser. C'est aussi cela e trail des Poilus ! Un voyage dans le passé en mémoire de ceux qui se sont battus pour notre liberté !

Et la cerise sur le gâteau.

Et pour parfaire cette aventure, petite récompense personnelle, certes futile et très éphémère, me voici pour quelques jours leader du classement vétéran du Trail Tour National... de quoi me réchauffer un peu le coeur après cette terrible épreuve.

 

 


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