Trail Yonne 2015 – Chevauchée solitaire…

The Trail Yonne 2015 - 63 km

samedi 02 mai - Sens - 15h

Pour cette troisième édition du Trail Yonne, et pour ma seconde participation après mon échec sur le 110k l'an dernier j'ai longuement hésité quant au titre à donner à mon compte rendu, tant je ne manquait pas d'inspiration.

Ainsi cet article aurait pu tout aussi se nommer : "Voyage au boue de la douleur", "Jusqu'au boue de la tempête", "Mission accomplie de bout en boue",... et j'en passe et des meilleurs. Si j'ai retenu le premier, c'est principalement parce qu' à compter du 20ème km et ce jusqu'à l'arrivée, je n'ai quasiment croisé aucun coureur (hormis à Villeneuve et en fin de parcours quelques retardataires du 35km).

Ce n'est pas faute de niveau, le premier était sur une autre planète, et nous étions 3 très loin derrière, à nous battre à distance pour nous disputer les 2 marches restantes sur le podium, mais plutôt faute de densité, le 5ème est relégué à plus de 3/4 d'heure !

J'ai pu ainsi me retrouver seul face à moi-même pendant de longues heures, seul face à mes doutes, face à ma détermination, et surtout face à mes douleurs. Un long voyage introspectif à la rencontre de soi, avec des moments (rares) d'euphorie et d'autres plus difficiles où tu te demandes ce que tu fous là !

Les raisons de ma venue sur le Trail Yonne -63km

L'année dernière, ma tentative avortée sur le 110km ne m'avait pas véritablement laissé d'amertume puisque cet échec avait été très riche d'enseignements et m'avait permis de rebondir sur la suite de ma saison.

Cependant, je ne souhaitais pas renouveler, pour le moment cette expérience, préférant rester sur mon format de course de prédilection, et ne voulant pas trop puiser dans mes réserves au vu de la suite de mon programme, plus que chargé.

Si ce Trail Yonne n'était pas en soi un réel objectif, mais plus une répétition générale en vue du Raid du Morbihan fin juin, il n'en restait pas moins que je m'étais donné pour but de monter sur le podium. En effet, il me semblait bien plus accessible ici que sur les courses auxquelles je participe habituellement, d'un niveau et d'une densité nettement plus relevés !

Je voyais donc la une bonne opportunité de jouer aux avants postes, sans pour autant me mettre la misère.... enfin sur ce dernier point, je ne suis pas certain d'avoir rempli ma mission !

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Récit de ma course :

Si le temps était très instable et menaçant, à quelques minutes du départ, il ne pleuvait pas encore. Il aura fallut que le speaker nous fasse un long discours pour que nous partions avec quelques minutes de retard, et l'arrivée de la pluie, qui dès lors ne nous quittera plus jusqu'à l'arrivée.

Certains profitèrent de ce long discours pour enfiler leur coupe-vent, mais bien que la température s'était un peu rafraîchie, je préférai rester en t-shirt pour ne pas surchauffer. En me disant aussi qu'il ne pleuvrait peut-être pas tout le temps !

A 15h06, c'est parti pour l'aventure, si dans les premiers mètres je me laisse déborder par de nombreux coureurs, dès la sortie du stade je reprends les choses en main pour remonter aux avants-postes et me positionner en seconde position du peloton. Cela ne veux pas dire grand choses car nous ne sommes pas tous dans la même course : certains sont partis pour 63km, d'autres pour 85 en solo ou en relais, et les plus courageux pour 110 !

Je ne m'aventure pas à remonter sur le premier et reste à distance raisonnable, enfin façon de parler, car je boucle ce 1er kilo en 3'49" !! C'est bien trop rapide et la grosse côte qui suit me remettra rapidement sur les bons rails !

C'est là qu'inévitablement j'allais me faire rattraper par quelques coureurs, cependant je ne m'attendais pas à me faire déposer par les premiers du 110 et du 85 !! Christophe, David et Guillaume naviguent sur une autre planète !! Ils sont incroyables et je ne peux même pas essayer de les suivre, alors que je n'ai que 65 bornes à faire !

A la fin de cette première côte ce sont trois autres coureurs qui me reprennent et me voilà alors 7ème du peloton, mais à quelle place de ma course, je l'ignore ? En réalité après la course je déduirais qu'à ce moment là j'étais probablement en tête !

Mais après ce début sur les chapeaux de roues, la voix de la sagesse l'emporte et je me concentre à me caler sur mon rythme, oubliant ainsi les fuyards et me concentrant uniquement sur mes sensations. Un peu plus loin, à la faveur de la seconde côte je me fais rattraper par deux autres coureurs, dont le futur vainqueur. Me voilà 9ème du peloton et je ne sais toujours pas où j'en suis de ma course !

Sur les km suivants, je suis parfaitement en phase avec mon plan de course et si je n'ai plus les premiers en visu, je suis à la lutte avec un coureur, probablement du 110, qui me remonte à chaque côte et que je distance à chaque descente (tout cela ressemble à du déjà vu !). Il me faudra une bonne dizaine de km pour le distancer définitivement, mais un autre, probablement sur le 63 pointe son nez dans mes rétroviseurs !

A la faveur d'une longue descente, je le distancerai et ne le reverrai plus.

Malgré des conditions climatiques de plus en plus difficiles, la pluie se faisant de plus en plus intense, cette première partie de parcours reste très roulante, avec certes un peu de boue, mais sans aucune difficulté. Néanmoins, les premières douleurs commencent à apparaître, et les longues portions de bitumes ne font rien pour arranger l'affaire, bien au contraire ! Au fil des km mes mollets se durcissent de plus en plus, j'ai beau me dire que les changements de rythme entre montées, plats et descentes, devraient m'aider à faire passer la douleur, il n'en est rien !

Plus les km défilent et plus mes mollets se font sentir, j'essaie bien de les étirer au maximum dans les côtes, de relâcher ma foulée sur le plat, d'amortir au mieux les descentes... c'est peine perdue ! Hormis ce 'petit' soucis, je suis très bien, les cuisses sont légères, le souffle parfait, bref je suis en pleine forme, juste un peu freiné par une mécanique récalcitrante !

Aux alentours du 26ème km je passe par le second ravitaillement, situé à Chaumot. Péline qui m'accompagne, assure les ravitos et me supporte, dans tous les sens du terme, sur cette course m'apprend que j'ai 5 bonnes minutes de retard sur les 3 extra-terrestres du 110 et 85 ! mais j'apprends surtout que je suis 3ème du 63 ! J'ai peine à y croire car il y avait vraiment pas mal de monde devant moi, mais à croire qu'hormis ceux cités précédemment, tous les autres étaient sur le relais !

Cette info me remonte le moral, mais mes mollets restent de marbre ! Il ne faut cependant pas faiblir et rester dans le rythme, je suis d'ailleurs toujours ok par rapport à mon roadbook !

A la sortie de ce ravito, nous bifurquons vers la gauche et abandonnons définitivement les concurrents des autres épreuves pour un petit parcours de liaison de quelques km, un peu plus sauvages avec quelques singles et des passages que la boue a rendu bien glissants et de fait beaucoup plus intéressants que par temps sec.

Moi qui avait gardé de cette course une idée de parcours beaucoup trop roulant, voir limite ennuyeux, me voilà ravi, certes les conditions météo y sont pour beaucoup, mais malgré tout la suite du programme sera beaucoup plus agréable que la première, avec des chemins plus intéressants et nécessitant parfois une certaine habileté pour ne pas glisser !

Mais revenons à nos moutons, et très rapidement me voilà sur les hauteurs de Villeneuve-sur-Yonne puis dans ses faubourgs. La vigilance s'impose car le fléchage dans les rues de Villeneuve est plus que léger et peu de bénévoles se trouvent sur le parcours pour nous guider.

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En effet, au passage sur le pont de l'Yonne, nous courrons sur le côté gauche du pont, une flèche indique d'ailleurs qu'il faut poursuivre tout droit (ce que j'ai fait) mais en réalité, il fallait tourner tout de suite à droite après le pont. Le fléchage était bien présent... mais sur la droite de la chaussée, impossible donc à voir pour nous qui arrivions de la gauche ! Et bien sûr personne pour nous indiquer la bonne direction ! Cette petite bévue me fera aller tout droit et visiter l'église, fort jolie d'ailleurs... mais me coûtera quasiment 1'30" !!

Malgré mes déboires je parviens à rejoindre le stade où m'attends Péline, qui me confirme ma troisième position. J'y croise également l'ami Karim Mosta, venu en voisin faire un coucou aux coureurs. Je ne m'attarde guère au ravitaillement et repars tranquillement. A la sortie du stade je croise le 4ème, j'évalue l'écart à 3, 4 minutes tout au plus. Il ne va pas falloir que je flanche d'autant qu'il a l'air en pleine forme ! J'essaie de donner le changer pour ne pas montrer mes faiblesses et ne pas lui donner trop d'espoirs. Mais je sais que je vais devoir batailler si je veux conserver ma place sur le podium !

Je n'ai donc pas le choix, je dois passer outre la douleur qui, au fil des kilomètres, devient de plus en plus insoutenable. Chaque pas est une torture, je sens les vibrations des chocs avec le sol se propager le long de mes mollets. J'ai l'impression de prendre un coup de marteau dessus à chaque pas ! Si je n'étais pas en train de jouer une place sur le podium, il est fort probable que j'aurai baissé les bras, ralenti, voir même stoppé ma course. Mais pas question de repartir d'ici avec un nouvel échec comme celui de l'an dernier ! Je vais me battre jusqu'au bout, du moins jusqu'à ce que je me fasse rattraper et dévorer par le prédateur qui est lancé à mes trousses !

Sur cette portion de retour vers Sens, les paysages et chemins sont nettement plus agréables que sur la première partie, mais également beaucoup plus boueux ! Cela dit, vu mon état, la boue amortit quelque peu les chocs et s'avère finalement un atout pour moi !

Malgré tout, les kilomètres défilent bien et si je commence à accuser le coup dans les montées, mon rythme global, bien que plus lent que prévu, reste raisonnable. Toutefois je m'attends à tout moment à me faire engloutir par mon poursuivant. Péline m'annonce que le second possède un bon quart d'heure d'avance sur moi, mais à ce moment là, je ne m'en soucie guère. Je suis entièrement focalisé sur ce qui se passe à l'arrière !

Me voilà à Marsangy, avant dernier ravitaillement. Je n'y reste que quelques instants, marche quelques mètres et repart en trottinant. Quelques minutes plus tard, Péline m'informe que je possède environ 7' d'avance sur mon prédateur. Malgré ma baisse de régime, je suis parvenu à accroître mon avance depuis Villeneuve !

J'en profites alors pour récupérer un peu dans la longue côte qui suit. Je veille cependant à ne pas m'endormir, car même si cette avance devrait suffire, je ne suis pas à l'abris d'un coup de mou, d'autant que mes mollets se font de plus durs. Malgré la douleur je me force à relancer dans les descentes pour tenter de préserver mon avance. La boue est de plus en plus présente et la pluie qui ne cesse rend le terrain très délicat.

Parti avec des chaussures légères, mais peu crantées, je suis un peu en délicatesse avec le terrain. A plusieurs reprise je fais quelques écarts, frôle la chute, mais parviens à chaque fois à rétablir l'équilibre, au prix d'efforts considérables qui viennent encore un peu plus massacrer mes mollets.

De temps à autres, nous commençons à rattraper des concurrents du 35km, je me sens ainsi un peu moins seul, même si bien sûr nous n'évoluons pas sur la même course ! Petit à petit je me rapproche doucement de la fin, une grande descente sur du bitume qui me fait souffrir le martyr et me voilà déjà à Gron pour l'ultime ravitaillement. Je suis revenu à moins de 5 minutes du second, mais je nai pas les ressources nécessaires pour aller le chercher, je me contenterai de me battre pour défendre la 3ème marche du podium !

Je marche quelques mètres, prend un dernier bidon pour la route et repars, doucement en trottinant légèrement pour aborder l'une des dernières grosses montées du parcours. Mon répit sera de courte durée car Péline m'informe que mon chasseur n'est plus qu'à 4 petites minutes derrière moi et qu'il ne s'est même pas arrêté au ravito.

Il va falloir serrer les dents, l'écart peux sembler suffisant mais il me reste encore une très grosse côte à négocier, la plus difficile du parcours et qui pourrait bien me coûter très cher ! Je n'ai donc plus le choix, il faut envoyer un maximum dans la prochaine descente, au risque de se cramer pour aborder cette dernière difficulté avec suffisamment d'avance pour ne pas se faire croquer. Car s'il me rejoint dans la côte, je ne donne pas cher de mes chances de résister dans les 2 derniers km !

Mais, arrivé au pied de cette ultime côte, l'accès est barricadé et une flèche nous indique une autre direction à suivre. Il n'y a personne sur place, j'ai quelques doutes, quelques hésitations, le parcours aurait semble-t-il été modifié, mais personne ne nous en a informé ? Un peu inquiet je décide néanmoins de suivre ces indications et m'engage le long d'une route interminable qui longe la voie ferrée.

Il n'y a pratiquement aucun balisage le long de cette route, le doute subsiste, mais je me dis que de toutes façons en suivant ce chemin nous sommes obligés de revenir vers Sens et rejoindre le parcours initial. Passé ce moment d'hésitations je m'emploie à aller le plus vite possible, dans cette longue, très longue ligne droite mon adversaire m'aura inévitablement en point de mire.

il ne faut pas craquer, ne pas lui donner le moindre espoir et en même temps il me faut être très vigilant pour trouver le bon chemin, il n'y a toujours personne pour nous indiquer la bonne route et le balisage est plus que léger. Je suis maintenant dans les faubourgs de Sens, je ne sais pas exactement combien il me reste à faire, mais à priori moins de 2 km.

Ces deux derniers km me paraîtront bien long d'autant que je ne suis pas du tout à l'abris d'une erreur. Régulièrement je jette un petit regard vers l'arrière pour voir si mon adversaire n'est pas en vue. Il n'est pas là, je continue, j'aperçois enfin une voiture de l'organisation, l'arrivée ne doit plus être bien loin, je fini par reconnaître la route qui mène au stade. Il ne me reste plus que 500m à parcourir.

C'est à ce moment là que mon fils m'appelle pour prendre de mes nouvelles, nous finirons ces derniers mètres ensemble, enfin presque. Le stade est là, un dernier regard vers l'arrière et je peux enfin relâcher la pression et savourer les derniers mètres qui me séparent de l'arrivée. Je prendrai même le temps de prendre la pose pour la photo !

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Voilà c'est fini !! je suis 3ème en 5h55'32"... très loin derrière le vainqueur, à 6' du second et surtout 3'30" devant le 4ème !

Je suis heureux d'avoir pu résister jusqu'au bout, de ne pas avoir craqué malgré la douleur très présente, content également de mettre fin à ce calvaire ! Mais je l'ignore encore, le plus difficile est à venir !

En  effet, à peine la ligne d'arrivée franchie que mes contractures deviennent insoutenables, je ne peux quasiment plus marcher !! J'aurais besoin de l'aide de mes compagnons pour monter sur le podium !!

L'effort aura été à la hauteur du résultat, il me faudra près de 3 jours avant de pouvoir marcher plus ou moins normalement et plus d'une semaine avant de pouvoir envisager un petit footing de décrassage ! Je n'avais pas prévu de me retrouver dans un tel état, mais le jeu en valait la chandelle puisque je m'offre le second podium de l'année et qui plus est au scratch (au final 2nd vétéran)

Je remercie tous ceux qui m'ont encouragé le long du parcours et plus particulièrement Péline qui a été parfaite dans le rôle d'assistante et à qui je dois en partie mon résultat de ce jour !

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