Raid du Morbihan 2015
Port Crouesty – Vendredi 26 juin – 12h00
Cette année plus que jamais ce Raid du Morbihan se présentait pour moi sous les meilleurs auspices :
- Une bonne préparation, bien qu’incomplète, mais suffisante.
- Un plateau un peu plus abordable que les années précédentes
- Un assistant de luxe avec la présence de mon coach en personne !
Restait une grande incertitude concernant les conditions météorologiques, car même si j’ai beaucoup travaillé sur ce point, je reste très vulnérables dès lors que la température s’élève un peu. Point d’autant plus primordial que cette année l’organisation ne nous a vraiment pas gâté en plaçant le départ le vendredi à midi : On peux difficilement imaginer pire horaire pour une course ! Car avec un départ à midi, c’est l’assurance de subir les heures les plus chaudes de la journée !
Secrètement, j’espérais retrouver les conditions de l’an passé où nous avions été bercés par les orages tout au long de la journée, le soleil de faisant sa ré-apparition qu’en toute fin d’après-midi. Mais il ne fallait pas trop rêver… Le verdict fût tout autre et nous dûmes composer avec un soleil légèrement voilé et une température autour des 24°. Certes nous étions bien loin de la canicule qui débuta dans les jours suivants, mais malgré tout c’était déjà bien chaud pour moi (et certains autres coureurs).
Malgré mes inquiétudes concernant la température, c’est serein que je me dirige vers la ligne de départ juste quelques minutes avant le coup de pistolet. L’occasion d’y retrouver mon pote Jean-Noël qui malheureusement sera forfait cette année pour cause d’une jolie cabriole assortie d’un poignet cassé quelques jours avant l’épreuve.
Le récit de mon 9ème Raid du Morbihan
Il est midi pétante en ce samedi matin lorsque le départ de la onzième édition du Raid du Morbihan est donné. Dès les premiers mètres je me retrouve aux avants-postes, au point que je me retrouve de suite en tête de course. Je préfère alors lever le pied et laisser le soin à un autre coureur d’ouvrir la route. J’ai l’impression de faire du sur-place, mais ce n’est réellement qu’une impression car je boucle le 1er km quasiment à 15 km/h.
Vu la chaleur, je me dis qu’il me faut encore ralentir, car sur ce rythme, je ne tiendrais sans doute pas bien longtemps. Je laisse donc filer le premier, qui prend quelques longueurs d’avance sans réellement s’échapper. Je laisse passer un petit groupe de 2 coureurs, vite rejoins par 2 autres pour me retrouver, bien au chaud, derrière ce quatuor.
Dès que le chemin s’élève un peu ou bien que nous croisons un escalier (il y en aura une quinzaine dans la première partie de la course) je n’hésite pas à marcher et laisser le petit groupe prendre de l’avance. Dès que cela redescend un peu, je fourni juste l’effort nécessaire pour recoller au groupe.
Sur cette première partie, le balisage est plus qu’incertain et les coureurs qui me précèdent commettent quelques petites erreurs, ce qui me donne l’occasion, même si moi aussi je me trompe parfois, de rattraper les quelques mètres d’avance qu’ils avaient pris précédemment. De l’arrière, personne ne revient plus et il semble clair que tout se jouera entre nous 5 et celui qui a pris quelques longueurs d’avance.
Mais aux environ du 10ème km, tout bascule, des vandales ont saboté le parcours, déplaçant plusieurs balises et nous écartant ainsi dangereusement du parcours de la course. Nous nous retrouvons alors au centre d’un village que nous n’aurions jamais dû traverser, et après quelques instants à tourner en rond, nous voilà nez à nez avec le reste du peloton, qui comme nous, a suivi la mauvaise piste.
Fort heureusement pour nous, c’est à cet endroit que nous croisons Arnaud Hairie (futur 4ème… et finalement 3ème…) qui, connaissant bien la région, parviens à nous remettre sur les bons rails et nous ramener vers les sentiers côtiers et le bon parcours. Mais, même si ces péripéties ont permis de reformer complètement le groupe de tête, cela a surtout permis un regroupement général des troupes : tout est maintenant à refaire !
Je saute alors dans les baskets du premier et me retrouve donc de fait à la seconde place. Pour tenter de re-faire le trou, je le suivrai sur environ 1 km avant de le laisser filer, car son rythme est alors un peu trop élevé pour moi. Je reprends alors mon rythme normal et me dirige en direction de Porh Néze, où l’année dernière j’avais perdu tout espoir de podium en ratant la bifurcation et faisant ainsi quasiment 2 km supplémentaires !
Cette fois-ci je ne me tromperais pas de direction, mais décidément Porh Néze ne me réussi pas pour autant !! Peu avant le point de ravitaillement je suis rejoins, et dépassé par Olivier Chantrel. Je me cale alors juste derrière lui pour parvenir au ravito en 3ème position.
C’est à cet instant, une nouvelle fois à Porh Néze, que tout vas basculer pour moi. N’ayant pas suffisamment potassé le règlement je commettrais ici une petite erreur qui me coûtera au final très cher ! En effet, j’avais demandé à mon suiveur de me retrouver sur ce point de ravitaillement, ce qui en soit n’est pas bien méchant, puisque sur une zone de ravitaillement officiel, mais malheureusement strictement interdit par le règlement de l’épreuve.
Excès de zèle, ou bien volonté d’une application stricte du règlement, j’écoperai sur le champ d’une belle heure de pénalité, réduisant ainsi à néant tous mes espoirs de podium ! Encore une fois Porh Néze m’aura été fatal !!
Dès l’annonce de cette sanction, tout se bouscule dans ma tête, que faire ? continuer ? arrêter ?… Cette question me taraudera pendant tout le reste de la course, mais en compétiteur que je suis, pas question de baisser les bras pour autant !! Je décide donc de poursuivre ma route, comme si de rien était. Finalement cet incident évacuera tout stress vis à vis du résultat, car maintenant je n’imagine même pas pouvoir me classer dans les 20 premiers à l’arrivée !
Mais pour moi, le plus important n’est pas le verdict, cruel, des juges mais bel et bien ce qui se passe sur le terrain ! A ce moment là j’oscille entre la 2ème et la 4ème position. Et même si je n’apparaîtrai pas dans le palmarès à ma place réelle, je vais continuer à me battre. Ce podium, qui maintenant c’est une certitude, ne pourra être que virtuel, je suis bien décidé à aller le chercher quand même ! Cela fait maintenant pratiquement 10 ans que je cours après, pas certain que l’occasion puisse se reproduire dans les prochaines années. Alors pas question de s’arrêter sur des subtilités réglementaires qui selon les points de vues sont justes ou bien aberrantes….
Quelques kilomètres plus loin, et l’espace d’un instant, je me retrouverai, virtuellement, en tête de la course. Par manque de signalisation, le leader s’est trompé de chemin, mais malheureusement, sans le savoir, je commettrais la même erreur. Fort heureusement pour moi, seulement quelques centaines de mètres plus loin, je le croise qui rebrousse chemin, et pestant une nouvelle fois contre ce balisage plus qu’incertain. Je fais moi aussi demi-tour, mais 3 de nos poursuivants sont déjà passés.
Si le leader reprend rapidement possession de son bien, pour ma part j’ai beaucoup plus de mal à recoller aux basques de ceux qui me précèdent. J’ai beau essayer d’accélérer, mais rien n’y fait. Il me faudra plusieurs km avant d’en rattraper un et revenir ainsi en 4ème position. Mais à ce moment là, je dois me résigner à laisser les autres partir devant.
A l’entrée de Sarzeau, la vigilance est de mise car en ville le balisage est, une nouvelle fois, difficile à suivre. Mais plus vigilant que les autres, j’évite les embûches et aperçois au loin un petit trio qui jardine un peu et qui visiblement a perdu un peu de temps dans la ville. Une aubaine pour moi qui les rejoins au ravitaillement.
Puisqu’ici l’assistance personnelle est officiellement autorisée (mais pas sur les lieux même du ravito, interdit aux accompagnateurs… ne cherchez pas à comprendre la logique là dedans) je ne fais qu’un passage éclair et ressort de là en tête ! Une nouvelle fois tous les écarts sont gommés !
Mon heure de gloire ne durera que quelques instants, car à peine quelques centaines de mètres plus loin, le futur vainqueur reprendra son bien et me laissera quasiment planté sur place tant la différence de rythme était flagrante.
Je tiendrais bon à cette deuxième position pendant 2 ou 3 km avant qu’un irrésistible Olivier Chantrel ne me rejoigne, me dépasse et prenne lui aussi définitivement le large. Me voilà alors installé confortablement à la 3ème position. Et même si je garde un petit espoir de pouvoir revenir par la suite sur les leaders, je ne me fais guère d’illusions, d’autant que la chaleur commence à faire son effet et qu’il me devient difficile de garder mon rythme.
La suite de mon périple sera une longue chevauchée solitaire durant laquelle je ne croiserai plus de coureurs. Je dois cependant rester des plus vigilants car même si cette portion du parcours est beaucoup plus simple, je ne suis toujours pas à l’abri d’un problème de balisage ou d’une petite faute d’inattention.
Au point suivant, à Le Hézo, je jardine un peu et manque de rater le point de contrôle, l’entrée de la salle n’étant pas bien balisé j’ai été contraint de faire tout le tour du bâtiment et ai bien failli repartir sans passer par le pointage… ce qui pour le compte aurait achevé ma course ! A ce moment là je suis encore à moins de 5′ d’Olivier Chantrel et tout est encore possible.
Malgré la fatigue, les km et la chaleur je tiens bon et ne baisse pas trop de rythme. Il me reste encore pas mal de km à avaler et la route est encore longue. Je n’ai pas véritablement d’idée de l’avance que je possède sur mon poursuivant immédiat, alors je ne peux pas me permettre de me relâcher. Le point de ravito suivant n’est qu’à 5 km, alors je me dis qu’il faut tenir et encore tenir, je pourrais m’offrir une petite respiration une fois là bas.
A Noyalo, je suis toujours sur une excellente moyenne puisque je suis toujours au dessus des 12 km/h… énorme après pratiquement 55 km de course pour quelqu’un qui ne supporte pas du tout le chaud !
Passé ce point, mon accompagnateur m’informe que j’ai au minimum 6-7 minutes d’avance sur le 4ème, c’est bien mais pas encore suffisant pour me mettre à l’abris d’un potentiel retour ou bien d’une baisse de régime de ma part. En ce qui concerne les 2 premiers, leur avance augmente légèrement, mais je dois bien vite me rendre à l’évidence : jamais je ne les reverrai !
Si à force de volonté et de courage je parviens à rester sur ma moyenne de 12 km/h jusqu’au 60ème km, je subis alors une forte baisse de régime et petit à petit mon rythme décroit pour passer à 11.. puis à peine 10 km/h. Distancé par les 2 premiers et sachant la pénalité qui m’attend à l’arrivée, j’ai de plus en plus de mal à garder ma motivation intacte. Mais pour autant pas question d’abdiquer !
En serrant les dents, je rejoins le ravito de Séné, il ne reste plus qu’une vingtaine de km à parcourir, je suis toujours dans mes temps prévisionnels, mais je sais que la route est encore longue et qu’il me faudra pas loin de 2 heures d’effort supplémentaires pour atteindre la ligne d’arrivée !
Quelques minutes plus tard, mon fils par téléphone m’informe que j’ai quasiment 30 minutes d’avance sur le 4ème !! Je suis alors partagé entre espoir et découragement : si je me dépouille je peux peut-être réaliser l’exploit de gagner une demi-heure supplémentaire et ainsi sauver un podium devenu alors inespéré ! mais si je suis réaliste fort est de constater que cela est bel et bien impossible !
Pendant quelques kilomètres j’alterne alors entre gros coups de mou et de rage, tantôt je retrouve mon rythme et tantôt je suis presque à l’arrêt !
Un peu plus tard, un autre coup de téléphone de mon fils me redonnera du baume au coeur, c’est incroyable, mais malgré ma pénalité, je pointe alors au 8ème rang ! Moi qui n’envisageais même plus de figurer dans les 20 premiers ! me voilà dans le top 10 !
Cette information me redonnera un coup de boost et je me lancerai dès lors dans une sorte de contre-le-montre face à des adversaires virtuels que je ne vois pas, mais qui pourtant seront bel et bien devant moi après l’arrivée ! C’est un scénario improbable qui s’offre à moi, sans aucune visibilité et dans le flou total, je dois néanmoins tout donner pour tenter l’impossible et surtout ne pas me faire rattraper par les suivants !
Malgré tout, les relances sont difficiles et dès que le chemin prend un peu de pente, je sens que mes jambes se font de plus en plus lourdes, les relances sont elles aussi de plus en plus difficiles, pourtant, il ne faut toujours rien lâcher face à ces adversaires invisibles !
Me voilà maintenant à moins de 3 km de l’arrivée, je relance une nouvelle fois et suis maintenant pratiquement à 12 km/h pour terminer le long du canal du port de Vannes. Je donne tout ce qu’il me reste d’énergie pour en terminer le plus rapidement possible.
A quelques centaines de mètre de l’arrivée, mon pote Jean-Noël me rejoint et malgré son poignet cassé quelques jours plus tôt, m’accompagne vers la ligne d’arrivée. Un dernier petit passage au bout du port et nous voilà sur la ligne d’arrivée !!
J’ai réussi mon pari, me voilà bel et bien 3ème en 7h48’39″… soit environ 2 minutes de mieux que l’an dernier. Je suis alors partagé entre le sentiment d’avoir, au bout de 9 participations, enfin accompli mon rêve de podium et cette fichue pénalité qui ne manquera pas de m’en faire très vite redescendre !
Mais peu importe le verdict des juges, car pour moi l’exploit sportif reste le plus fort que toute décision arbitraire. Je suis arrivé 3ème et 1er vétéran sous l’arche d’arrivée, et ça, personne ne pourra me le retirer ! J’ai enfin, du moins en partie, réalisé ce rêve qui me hante depuis près de 10 ans ! Je suis dans les 3 premiers du Raid du Morbihan !
Si j’ai du mal à réaliser la portée de mon exploit, le temps et les minutes qui défilent ne vont pas tarder à me faire redescendre sur terre. Moins d’une demi-heure après moi, voilà que le 4ème arrive et du même coup me prive définitivement de ce podium. L’attente est encore longue et au fil des arrivées je recule dans le classement.
Au bout d’une heure, le verdict tombe enfin : je serais finalement classé 7ème… à seulement 6 petites minutes du 5ème… C’est très frustrant et il y a de quoi nourrir quelques regrets, mais je resterai positif et ne conserverai en tête que le résultat sportif.
Et finalement ce résultat a peut-être des bons côtés car cela me donne une motivation supplémentaire pour revenir l’année prochaine, encore plus déterminé, encore plus fort et bien décidé à prendre ma revanche !
Loading...
