Raid du Morbihan 2018 : La der ?

Raid du Morbihan 2018

Port-Crouesty, vendredi 29 juin 2018 - 15h00

Après ma course quasi parfaite de l'an dernier, j'ai longuement hésité avant de remettre le couvert pour cette édition 2018 du Raid du Morbihan. Que pouvais-je bien chercher de plus ? Juste cette ultime marche à gravir pour décrocher enfin le Graal absolu ?

Après un début de saison correct mais sans plus, un gros passage à vide au sortir de la Pastourelle, je n'étais pas au mieux de ma forme en cette fin de mois de mai. Pourtant je décidais de mettre en place le programme prévu pour préparer ce grand rendez-vous.

Passé les premiers doutes, j'ai rapidement retrouvé la forme, les séances s'enchaînaient sans difficultés, et je me prenais à rêver. D'autant que le plateau était cette année à ma portée, pas de grand cadors au départ.

Les dieux de la météo...

A quelques jours de l'événement, j'étais très confiant en mes possibilités, mais c'était sans compter sur la météo qui nous préparait une belle canicule pour le jour de la course. Jusqu'au bout j'ai espéré, mais en vain, il fallait se résoudre à l'évidence : il allait faire chaud, très chaud,... trop chaud !

Un départ à 15h... l'inconscience ?

Cela fait des années que j'essaie de faire entendre ma voix sur le non sens total que représente un départ à 15h, en plein été, pour une course de 90 km ! Mais jusqu'à présent rien n'y fait !

Nul besoin d'être météorologue pour savoir que les heures les plus chaudes de la journée sont précisément... entre 15h et 18h !! Comment peut-on laisser s'élancer un peloton de plus de 1000 coureurs par plus de 35 degrés à cette heure là ?

Certains supportent la chaleur mieux que d'autres, ce n'est malheureusement pas mon point fort ! C'est donc en toute conscience que je me dirige vers la ligne de départ, je le sais, même en prenant un départ raisonnable, mes chances de succès sont quasi nulles ! Néanmoins, par respect pour tout le travail accompli, pour tous les sacrifices réalisés, je décide malgré tout de tenter ma chance !

La course

A 15h précises, le départ est donné. Conformément à ma stratégie, je reste planqué dans le peloton, le temps de faire coucou à Péline en passant puis j'adopte un train de sénateur : 1er km en 4'26".

Je me place aux alentours de la 10ème place, en retrait du groupe des favoris que je garde en visu, mais sans chercher à les rattraper.

Il va en être ainsi pendant les premiers kilomètres que je gère tranquillement, pour le moment tous les voyants sont au vert, je ne fais pas d'efforts superflus.

La remontée tranquille

Alors que je maintient un rythme constant par rapport à celui imprimé au départ je commence progressivement à reprendre les coureurs partis devant moi.

C'est ainsi que je me retrouve 7ème, alors que l'écart par rapport à mes adversaires monte quasiment à la minute, en à peine 2 km, et sans avoir fourni le moindre effort, je remonte à hauteur des frères Chantrel, que je dépasse dans la foulée... en les laissant quasiment sur place (Olivier terminera finalement second, à seulement 40 petites secondes du vainqueur).

Je dépasse également un autre coureur... et me voilà déjà 4ème.

Du rêve à...

Les coureurs qui me précèdent, je le sais, sont partis trop vite, ce n'est qu'une question de temps avant que je ne les rattrape. Je me prends alors à rêver ! Mon jour serait-il enfin arrivé, malgré ces conditions qui ne me sont pas favorables ?

Bien sûr, il est encore trop tôt pour faire des plans sur la comète, mais tout semble se passer sous les meilleures hospices. Au fil des kilomètres je prend de plus en plus d'avance sur Olivier Chantrel, mon plus fidèle et grand adversaire sur cette course.

Au premier ravitaillement, je prends mon temps et même si 2 coureurs repassent devant moi à cette occasion, je ne m'en fais pas pour autant. Une petite accélération et en 2 kilomètres, je les reprends et reviens à la 4ème place.

Je déroule ma partition, tout se passe comme prévu, quelques kilomètres plus loin je rattrape le 3ème et le laisse sur place... me voilà sur le podium !

Une première alerte

Alors que nous nous approchons du 2ème point de ravitaillement, j'ai un premier visuel sur le second ! Alors même que je m'apprête à l'avaler, une première alerte fait son apparition.

Me voilà victime d'un énorme point de côté qui m'oblige à lever le pied, à marcher quelques mètres puis à repartir sur un rythme plus lent. Le second en profite pour reprendre le large.

Le ravitaillement du 35ème km n'est pas loin. Je me dis qu'à cette occasion j'aurai le temps de souffler, et de faire passer ce maudit point de côté.

Je me ravitaille bien, en prenant le temps de m'hydrater et de m'asperger d'eau puis je repars en marchant, rejoins par Vincent Hérault, je décide de le laisser prendre un peu les devant pour me tirer un peu.

Au bout de quelques kilomètres, l'alerte semble être passée, je reprends alors mon rythme normal et reprends la 3ème place, prenant ainsi quelques longueurs d'avance sur Vincent.

La machine s'enraye

Ma joie ne sera que de courte durée, car comme il y a deux ans, à l'abord des marais salants, aux environs du 40ème km, je ne peux plus tenir le rythme.

Vincent me rattrape, je tente de me coller derrière lui, mais je ne tiendrai guère plus d'un km. Mon point de côté est revenu, plus fort qu'auparavant, à chaque inspiration, à chaque pas, la douleur se fait plus vive !

Je dois me résoudre à marcher un peu pour tenter de le faire passer une nouvelle fois, mais la chaleur faisant, les premiers signes de déshydratation se font sentir !

Le début de la fin

Très vite je comprends que la fin est proche, que je ne serais plus en mesure de revenir dans le match. J'alterne tant bien que mal marche et course à faible rythme. Je vois Vincent et le podium s'éloigner inexorablement !

Coup de chaud, malaise vagal,.. je ne sais pas trop mais la tête commence à me tourner, je ne peux plus guère m'hydrater. Mes forces et mon mental m'abandonnent... c'est la fin du rêve

Je marche de plus en plus, cours de moins en moins, l'abandon se profile à l'horizon. Je me forcer à avancer pour rejoindre le ravitaillement du Hézo, où je pense alors mettre un terme au calvaire.

Malgré tout, à ma grande surprise, personne ne reviens derrière moi ! Je l'apprendrai plus tard, mais à ce moment là je possédais plus d'un quart d'heure d'avance sur les futurs vainqueurs !

Au ravitaillement du Hézo je prends la décision, sans trop y croire de continuer. Le second n'est pas encore reparti, je reprends donc, provisoirement la 3ème place !

Stop ou encore ?

Joie de courte durée, car à peine reparti et me voilà de nouveau contraint à alterner marche et course lente. La chaleur est insupportable, je commence à avoir quelques nausées et ne peut plus m'alimenter. Cette fois la messe est dite ! Je poursuis en marchant, me faisant rapidement rattraper par plusieurs coureurs.

Je n'ai plus le coeur à continuer, mon rêve s'est envolé. Que faire ?

Continuer au risque de mettre ma santé en péril ? Dans d'autres conditions je l'aurai fait sans aucune hésitations, mais je ne suis revenu sur cette course que dans un seul but... et celui-ci est désormais totalement hors de portée !

Il ne me faut que quelques instants pour prendre ma décision : je n'irai pas plus loin ! J'appelle Péline pour qu'elle vienne me récupérer au bord de la route, pour mettre fin à ce calvaire !

Je ne rêve que d'une chose : une douche et un Mc  Do !

Descente aux enfers

Une fois convenu d'un point de rendez-vous, je m'arrêtes net, en attendant la voiture, la libération, la fin de ce cauchemar. Quelques minutes plus tard, Péline me rejoint, mais au lieu de monter dans la voiture, je m'assois au bord de la route.

Je laisse alors aller mon trop plein d'émotions et craque complètement, là assis au bord du fossé ! Quelques minutes pendant lesquelles tout s'écroule. Jamais je ne réaliserai ce pari fou que je m'étais fixé il y a de cela un peu plus de 10 ans... car cette fois j'en suis (presque) sûr : c'était la dernière fois. Dernière tentative pour tenter de remporter cette course qui me tenait tant à coeur...

La fin d'une course... le début d'une autre

Il est quasiment 20h, cela fait une bonne dizaine de minutes que je suis là , hagard, dans le fond du fossé. Le ciel se couvre et la température commence à baisser un peu.

Je ne suis toujours pas décidé à monter dans cette voiture pour mettre un terme définitif à l'aventure. Etonnamment, je me sens un peu mieux, exit le point de côté, exit les nausées.

Je me décide alors à remonter en selle, non pas pour aller chercher une place, mais juste pour ne pas terminer sur un abandon, juste pour Péline à qui j'ai demandé tant de sacrifices pour cette course.

Nous convenons alors de nous retrouver un peu plus loin, juste pour voir, et nous prendrons une décision à ce moment là.

Je repars en marchant, je suis aux environ de la 13ème place, mais quelle importance... Au bout de quelques instants, je me remets à trottiner en douceur.

A ma grande surprise, je me sens mieux, même si bien sûr le rythme n'est plus du tout le même, je parviens à courir à environ 10 km/h... tranquillement, à mon rythme.

Vers un nouvel objectif

Oublié donc les rêves de victoire, je n'ai plus que pour seul objectif d'aller au bout de cette course, de franchir, une dernière fois, cette ligne d'arrivée.

J'ai vraiment l'impression de vivre une toute autre aventure, une toute autre course, avec cet objectif unique et simple d'aller au bout.

Les kilomètres s'enchaînent et petit à petit mes envies d'arrêter s'estompent et font place à cette volonté de relever ce nouveau challenge.

Une belle aventure...

Je me surprends même à prendre du plaisir dans ce nouveau défi qui s'offre à moi, ou plutôt à nous, car plus que jamais c'est une course d'équipe. Je ne rêve plus que d'une chose, franchir cette ligne d'arrivée à deux avec Péline.

Chaque fois qu'elle me croise sur le chemin est une occasion de passer quelques instants ensemble, de partager quelques secondes de complicité avant de repartir à l'assaut du tronçon suivant.

La remontée au classement

Alors même que je n'ai plus aucune ambition au général, je réalise une belle petite remontée, et je rattrape progressivement quelques coureurs devant moi. Me voilà désormais aux portes du top 10, l'occasion donc de me donner un nouvel objectif, certes bien futile par rapport à l'objectif initial, mais malgré tout un objectif quand même !

La fin de l'aventure

Même si je suis dans le dur, même si le temps semble durer une éternité, je savoure chaque instant, chaque kilomètre parcouru, car je le sais, c'est la dernière !

Dernière fois que je foulerai ces chemins sur cette course, dernier épisode d'un feuilleton qui s'est écrit en 12 tomes !

Ce n'est pas sans une certaine émotion que je me rapproche de l'arrivée, de ces derniers kilomètres d'une extraordinaire aventure.

Me voilà, au bout d'un peu plus de 9 heures d'efforts, sur le port de Vannes, plus que quelques mètres à parcourir pour franchir la ligne d'arrivée, main dans la main avec Péline, et voilà c'est terminé !

J'ai réussi ce pari un peu fou de terminer, une dernière fois, ce Raid du Morbihan. La place ne sera qu'anecdotique, mais je réussi, malgré tous mes déboires à rentrer une nouvelle fois dans le top 10 en terminant au 9ème rang.

Une page se tourne

En franchissant cette ligne d'arrivée, c'est une page de mon histoire qui se tourne. Je n'y reviendrai plus, du moins pas avant quelques années. Je ne réaliserai jamais ce rêve un peu fou de remporter cette course qui me tenait tant à coeur, mais après tout, je n'étais pas si loin l'an dernier avec cette superbe seconde place scratch et victoire en vétéran....

Maintenant je vais me tourner vers d'autres défis, d'autres objectifs, d'autres courses.... Prendre du plaisir et découvrir d'autres lieux, d'autres challenges.

La fin d'une histoire marque toujours le début d'une autre... celle là n'est pas encore clairement définie et tout reste à écrire, mais elle sera tout aussi belle et passionnante, je n'en doute pas une seconde !

 


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2 réflexions au sujet de « Raid du Morbihan 2018 : La der ? »

  1. Félicitations champion que cest difficile a remettre en route quand l’objectif ne peut plus se faire…bravos pour l’abnégation que tu as eu pour aller au bout…

    1. Merci beaucoup,
      Oui c’est pas facile, mais par respect pour le travail accompli et pour mes proches qui subissent ma passion au quotidien, il n’était pas concevable de monter dans la voiture et de baisser les bras sans avoir tout tenté 🙂

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